vendredi 23 mai 2008

La Planification 1

Les idées qu'on va développer ici sont dues à Matt Flynn, Sunny Mehta et Ed Miller. On appelera cela la théorie de la planification par SPR. Leurs idées sont développées dans Professional No-Limit Hold'em : vol. one. Avec l'expérience, ils ont remarqué des invariants ou plutôt des habitudes très marquées des joueurs de NLHE aux limites moyennes. Ces invariants portent sur l'argent que les joueurs risquent avec une main d'une force donnée. Ça s'exprime en multiple de la taille du pot preflop. Par exemple, un joueur moyen qui possède la top paire kiker moyen au flop, typiquement, il callera une mise de la taille du pot au flop, un(e mise de la taille d'un) demi pot à la turn et un tiers du pot à la river, mais pas plus ! S'il engage plus, par exemple, en raisant la turn ou autre, la plupart du temps il aura mieux que la top paire kiker moyen. Le problème, c'est qu'on ne sait pas s'il va engager plus que ce qu'on a planifié de miser, et donc dans le cas où il montre qu'il veut engager plus, on se sent battu (et à forte raison), donc soit on fold, faisant confiance à notre read, en risquant de se faire bluffer, soit on call la pire main en se pensant commité. Donc on peut être soumis à deux grosses erreurs.

Donc pour éviter de faire l'erreur du fold de la meilleur main, il suffit de ne pas avoir plus à miser que ce qu'on prévoit de miser, car on ne laisse pas à l'adversaire la possibilité de mettre plus (ou dans le cas où on couvre l'adversaire, de l'empecher de nous demander de mettre plus). Pour ça, il suffit, en fonction de la main qu'on veut toucher au flop, de regler la taille du raise preflop pour que le stack minimum des stacks mis en jeu soit au plus égal à 4,5 fois le pot preflop, car dans ce cas le pattern « bet 1 pot, bet1/2 pot, bet 1/3 pot » correspond à un all-in décomposé car la somme des mises fait en tout 4,5 fois la taille du pot preflop. En gros l'idée, c'est « quand on touche, on peut raisonablement se commettre, i.e. sans se faire battre ».

Reste un problème : quand les tapis sont tros gros, la taille du raise preflop qui donne le bon rapport est trop grande pour qu'ils calls avec ce qu'on veut (par ex., quand on raise AK preflop, on veut typiquement être suivi par AQ, AJ, AT, KQ, KJ, KT), on doit créer des petits pots, voir tout petit preflop, car si on touche, on veut pouvoir folder sans difficulté si l'adversaire met plus que ce qu'on veut. Et on foldera sans difficulté car on ne se sentira pas commitee vu que le pot est petit relativement aux stack restant (le seuil de la commission est 1/3 du stack).

On veut donc, quand on vise de toucher une TPTK au flop, que le minimum des stack engagés soit au max d'une taille de 4,5 fois le pot preflop. On appelle ça le target SPR (Stack-to-Pot-Ratio cible).

En réflechissant un peu, on constate que cette technique permet de perdre moins ou autant quand on touche et qu'on est battu, et de gagner autant ou plus quand on touche et qu'on n'est pas battu. Donc en somme de perdre moins et de gagner plus, i.e. d'optimiser ses gains et de diminuer ses pertes.

On a déjà dit que le joueur moyen était prêt, avec sa TPKmoyen, à coller 1 pot au flop, la moitié d'un pot au turn et le tiers du pot à la river, c'est à dire en tout 4,5 fois le pot preflop (1 + 1,5 + 2). Par expérience, Flynn, Mehta et Miller observent aussi que le joueur moyen avec sa TPTK est prêt à coller un pot au flop, deux tiers du pot au turn et la moitié du pot à la river, ce qui fait 6 fois le pot preflop. On en déduit que si on vise de flopper une overpaire solide, comme AA ou KK voire QQ qui floppent de telles overpaires, on doit réaliser un SPR de 6 pour se commettre raisonnablement. Ils observent aussi qu'un joueur moyen collera pot-pot-pot avec une double paire haute voire moyenne. Ce qui indique qu'il colle 12 pots preflop (1+2+9), donc le SPR visé si l'on vise de flopper le brelan est de 12, donc on peut se commettre raisonnablement si touche au flop avec les pocket paires quand le SPR est de 12. On vise donc de réaliser un SPR de 12 avec les pocket paires moyennes (TT-55).

On résume ces informations dans le tableau suivant en indiquant le risque que prend un joueur suivant son type (tight, average, loose) et la force de son jeu au flop (TPKmoyen, TPTK, double paire). Le risque est quantifier par le SPR et entre parenthèse sont indiqués les patterns de calls max qu'il peut faire.


Type

Big TPTK

Big Overpair

Set

Tight

2 (1, check , 1/3 ou 1, 1/3, check)

4 (1, 1/2, 1/3)

8 (1, 2/3, 2/3)


Average



4.5

(1, 1/2, 1/3)



6

(1, 2/3, 1/2)


12

(1, 1, 1)

Loose

7 (1, 2/3, 2/3)

10 (1, 1, 2/3)

20 (1, 1, 2)


Pour obtenir le bon SPR, la technique est facile, on considère le tapis effectif (= le min des stacks des joueurs qui sont visés pour entrer dans le coup, le sien y compris) en nombre de BB, on évalue le nombre de callers qu'on veut dans le coup et on raise le nombre de BB indiqué dans le tableau pour obtenir le SPR de la couleur indiqué. Par ex., on a AK avec un tapis de 80 BB, et on veut 2 callers, on doit donc raise à 7% du stack effectif, donc à 5,6 BB pour obtenir un SPR de 4,5 qui nous permettera de se commettre si on touche le flop. Si on a un tapis de 100 BB et qu'on vise 2 callers, le tableau indique de raise à 7 BB, ce qui est souvent trop pour être suivi avec AQ, AJ, AT, KQ, KJ, KT, donc on ne peut pas obtenir le SPR désiré si on doit raise en premier, donc on doit créer un petit pot, c'est à dire limper, et si il y a de l'action, on reraise à 7BB, voire 10 BB s'il est tout seul, pour obtenir le SPR de 4,5. Donc la technique du limpe-reraise avec les AK, AQ est adaptée aux stacks de 100 BB quand personne n'a parlé avant nous (avec AQ, se méfier d'AK si on doit limpe-reraise).


Stack


Il faut raise un nombre de BB de ↓


On vise →


1 call

2 call

3 call

1 call

2 call

3 call

1 call

2 call

3 call

Raise en % du stack →

10 %

7 %

3%

7 %

5 %

4%

4%

3%

2%


50 BB

5

3.5

1.5

3.5

2.5

2

2

1.5

1


80 BB



8


5.6


2.4


5.6


4


3.2


3.2


2.4


1.6


100 BB



10



7


3


7


5


4


4


3


2

150 BB

15

10.5

4.5

10.5

7.5

6

6

4.5

3

200 BB

20

14

6

14

10

8

8

6

4

300 BB

30

21

9

21

15

12

12

9

6


Quand le stack effectif est de 100 BB ou plus, ce qui est assez souvent le cas, le raise exigé avec les mains d'attaque comme AK, AQ, voire AA, KK, QQ est souvent trop grand pour atteindre le SPR visé de 4,5 ou 6, surtout si la table est en ambiance serrée. Si la table est loose, voire très loose, pas de soucis, la plupart colleront assez souvent avec des AQ, AJ, AT, voire KQ, KJ quand on raisera à 7 BB avec AK. Mais comme la plupart du temps c'est ambiance serrure, comme sur le net, on doit évaluer si le raise de 7 BB (ou 5 BB avec AA, KK) ammènera des AQ, AJ, AT..., ce qui n'est pas souvent le cas. Si on constate que l'ambiance s'est libérée en plus loose, alors raiser direct, sinon appliquer un limpe-reraise fonctionne. En visant les ptits stacks, le reraise sur eux est parfait, et souvent un raise classique de 3 BB sur 2 pit stack (50 BB), ou 5 BB sur un ptit stack est parfait pour AK, AQ (car il donne un SPR de 4,5).

Donc, en somme avec un stack de 100 BB, soit on limpe-reraise à 7BB ou 10BB sur des gros stack (suivant qu'ils sont 2 ou 1) ou on raise à 3BB ou 5BB sur des petits (suivant qu'ils sont 2 ou 1). Suelement, juste faire attention au fait que les adversaires considèreront le reraise comme un signe très fort, donc ils se commeteront seulement en battant JJ, donc avec paire de K ou paire d'A floppé minimum. Donc se méfier du AQ limpe-reraise qui touche sa dame si en face on se commet facilement.

On voit facilement que la technique du SPR est bien mieux adaptée au shorthanded, car les raises preflop sont moins liés à la force directe de la main.

D'abord se demander si on peut raise fort et être suivi par ce qu'on veut, et si la réponse est négative, limpe-reraise. Donc toujours avoir en tête le range visé des mains victimes du raise :

AK ← A : AQ, AJ, AT (- AA) K : KQ, KJ, KT (- AA, KK)

AQ ← A : AJ, AT (- AA, AK) Q : KQ, QJ, QT (- AA, KK, QQ)

AJ ← A : AT, KJ (- AA, AK, AQ) J : QJ, JT (- AA, KK, QQ, JJ)

KQ ← K : KJ, KT (- AA, KK, AK) Q : QJ, QT (-AA, KK, QQ, AQ)

Les suited connectors visent les couleurs et les suites qui se touchent sur 5 cartes et non au flop (sauf bingo !). Aussi elles aspirent tt le stack de l'adversaire s'il a le brelan par ex ou une suite sur une couleur qu'on a. Donc le SPR visé est souvent sup à 20 avec ces mains là. Le tableau suivant montre qu'on est pas à l'aise pour jouer ces mains avec un stack inf à 100 BB, et qu'avec un tel stack de 100 BB, le limpe est souvent ce qu'on peut faire de mieux sauf cotes exeptionnelles.



Raise

SPR ↓


On vise →





1 call


2 call


3 call


4 call

50 BB

1 BB

2 BB

21

10

16

8

12

6

10

5

80 BB

1 BB

2 BB

34

17

26

13

20

10

16

8


100 BB


1 BB

2 BB



24

22


32

16


24

12


20

10

150 BB

1 BB

2 BB

3 BB

66

33

23

50

25

16

38

19

12

30

15

10

200 BB

1 BB

2 BB

3 BB

88

44

30

66

33

22

50

25

16

40

20

13

300BB

1 BB

2 BB

3 BB

4 BB

132

66

46

35

100

50

33

25

75

37

25

19

60

30

20

15


Un ajustement essentiel à la théorie de la planification par SPR : plus il y a de joueurs dans le coup, plus le SPR devra être bas. C'est évident. Les SPR évalués sont toujours considéré en heads up au flop.

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